La situation hydrique en Jordanie ne cesse de s’aggraver : les pénuries y sont toujours plus fréquentes, et toujours plus longues. Aujourd’hui, la part annuelle des ressources en eau renouvelables par habitant est inférieure à 60 m3, en raison du climat, semi-aride, d’une part, et d’autre part d’un taux de croissance démographique très élevé. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la Jordanie est bien partie pour se retrouver dans un état de « pauvreté en eau extrême » d’ici 2025 si elle n’avance pas à grands pas sur cette question, et rapidement.

L’urbanisation rapide du pays s’est accompagnée d’un double phénomène : réduction de la recharge des nappes souterraines et augmentation du ruissellement des eaux pluviales. En raison de la rareté des zones d’infiltration naturelle de l’eau, la quantité d’eau perdue à jamais pour les nappes phréatiques est colossale.  La Jordanie assiste depuis quelques années à la survenue d’inondations toujours plus sévères, qui emportent vies humaines et animales et détruisent maisons et infrastructures. Aujourd’hui plus que jamais, il est urgent de s’attaquer au problème des eaux de ruissellement et d’explorer les différentes pistes méthodologiques de la rétention des eaux de ruissellement (c’est-à-dire des eaux pluviales qui ruissellent).

Le projet WES (Water and Environment Support – appui dans les domaines de l’eau et de l’environnement), qui est un projet d’envergure régionale financé par l’Union européenne, vient de lancer une intervention destinée à assister la Jordanie à recenser les différentes mesures naturelles de rétention d’eau (MNRE). Le professeur Michael SCOULLOS, chef de l’équipe du projet WES, indique que le projet sera mis en appui auprès de la Jordanie pour aider celle-ci à adopter les bonnes pratiques mises en œuvre dans d’autres pays et à déterminer quelles sont les mesures les mieux adaptées au contexte jordanien spécifique.

Au cours de la réunion de lancement de l’intervention – qui s’est tenue en ligne, et à laquelle participaient des représentants de l’Autorité de l’eau jordanienne, du Ministère jordanien de l’eau et de l’irrigation et de la délégation européenne en Jordanie et les experts du projet WES – Demetris Zarris, expert du projet WES qui dirigera les différentes activités de cette intervention, a expliqué que les mesures naturelles de rétention d’eau étaient considérées comme des solutions fiables pour contribuer à lutter contre les pénuries d’eau et à atténuer les risques d’inondation, en outre très peu coûteuses : comme elles sont naturelles, elles ne nécessitent pas de gros investissements infrastructurels. En outre, les mesures naturelles de rétention d’eau sont des mesures multifonctionnelles, en ceci qu’elles visent à protéger les ressources en eau tout en apportant une solution aux problèmes d’eau et en restaurant ou pérennisant les écosystèmes naturels.

En un premier temps, il est prévu de dresser un état des lieux des mesures naturelles de rétention d’eau actuellement mises en œuvre par d’autres pays, dans la région méditerranéenne aussi bien qu’en Europe, voire dans d’autres régions, et de repérer celles qui s’appliquent aux zones arides et semi-arides. Il s’agira ensuite de choisir deux zones pilotes pour réaliser les activités prévues dans le cadre de cette intervention. L’une des zones pilotes se trouvera en zone périurbaine, et l’autre en zone rurale ou dans un environnement naturel.  Une fois les deux zones pilotes sélectionnées, plusieurs mesures naturelles de rétention d’eau seront conçues spécifiquement pour ces deux zones, et une analyse coûts-bénéfices sera effectuée, considérant les bénéfices liés à la rétention d’eau et les coûts qu’entraîne la mise en œuvre de ces mesures.

L’intervention se terminera par un atelier, au cours duquel les résultats seront présentés dans une optique de réplication de ces mesures dans d’autres régions de Jordanie.